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Structure sociale naturelle ou Hiérarchie de domination ? Deux dynamiques à ne pas confondre

  • Photo du rédacteur: Audrey Hesseling
    Audrey Hesseling
  • 1 août
  • 4 min de lecture

Dernière mise à jour : 2 août


Dans la plupart des sociétés humaines, passées comme présentes, ainsi que chez de nombreuses espèces animales, on observe l’émergence de structures sociales. Celles-ci permettent de coordonner les actions collectives, de répartir les rôles et responsabilités, et de maintenir un certain ordre au sein du groupe.


Cependant, chez l’être humain, ces structures se transforment souvent en quelque chose de plus rigide, plus problématique : la domination.


Ces deux notions : structures sociales et hiérarchie domination, sont fréquemment confondues. Pourtant, leurs logiques profondes sont très différentes. Les distinguer clairement permet de mieux comprendre les dynamiques de pouvoir qui traversent nos sociétés et notre rapport au monde.


🔹 Structure : une fonction d’organisation sociale


Une structure, au sens fonctionnel, n’a pas besoin d’être oppressive. Elle peut émerger naturellement dans des groupes où la coopération est nécessaire, et où certains individus, en raison de leur expérience, de leurs compétences ou de leur sagesse, se voient confier des responsabilités temporaires ou contextuelles.


Dans les sociétés traditionnelles, par exemple :

  • Les anciens ou les chefs sont choisis pour leur capacité à rassembler ou à arbitrer, pas pour dominer.

  • Le leadership est souvent circonstanciel : il peut évoluer, être partagé, voire contesté sans provoquer de rupture.

  • Les décisions sont souvent prises de manière collective ou à travers des mécanismes de consensus, non imposées unilatéralement.

Dans ce cadre, la structure reste au service du groupe, et non l’inverse. Elle joue un rôle de régulation, d'efficacité ou de sagesse partagée, sans confisquer la liberté ni la dignité des autres membres.


🔹 Hierarchie de domination : une logique de contrôle et d’asymétrie


La domination, quant à elle, repose sur un déséquilibre structurel entre ceux qui détiennent le pouvoir et ceux qui le subissent. Elle va bien au-delà d’un simple besoin d’organisation : elle vise à conserver l’autorité, concentrer les ressources, et institutionnaliser l’inégalité.


Elle se manifeste notamment par :

  • Une centralisation durable du pouvoir entre les mains de quelques-uns,

  • L’exclusion des voix dissidentes ou marginalisées,

  • La production de normes qui légitiment l’infériorisation de certains groupes.

Contrairement à la structure sociale naturelle, la hiérarchie de domination tend à s’autonomiser et à se reproduire. Elle construit des systèmes où l’autorité devient une fin en soi, où les rapports deviennent verticaux, verrouillés, et parfois même violents.


🔹 De la domination sociale à la domination du vivant


La logique de domination ne se limite pas aux rapports humains. Elle s’est également étendue à l’ensemble du vivant, au fil de l’histoire récente, à travers :

  • La domestication puis l’industrialisation massive des animaux d’élevage,

  • L’exploitation intensive des écosystèmes, forêts, sols, océans,

  • L’extraction sans limites de ressources, souvent justifiée au nom du progrès ou du profit.

Ce basculement n’est pas toujours né d’une volonté consciente d’asservir, mais de l’extension d’un modèle culturel basé sur la séparation entre l’humain et la nature, sur l’idée que tout peut être maîtrisé, exploité, contrôlé.

Cette domination globale a aujourd’hui des conséquences écologiques et éthiques profondes : effondrement de la biodiversité, crises climatiques, épuisement des ressources, perte de sens.


🔹 Pourquoi cette distinction est-elle essentielle ?


Parce que toute structure n’est pas à rejeter, et toute domination n’est pas légitime. Confondre les deux nous empêche de faire des critiques justes et constructives.

  • Une structure sociale peut être évolutive, discutée, renégociée, mise au service d’un but commun.

  • Une domination tend à se rigidifier, à devenir structurelle, et à produire de l’injustice, de la violence ou de la souffrance — même quand elle se prétend "naturelle" ou "efficace".


En comprenant cette distinction, nous pouvons mieux analyser les déséquilibres sociaux, politiques ou environnementaux de notre temps. Cela nous aide aussi à imaginer d'autres manières de faire société : plus horizontales, plus inclusives, plus respectueuses du vivant.


🔹 Conclusion : vers des modèles de cohabitation plus justes


Distinguer structure sociale et hiérarchie de domination, c’est ouvrir un espace de réflexion pour repenser nos façons d’habiter le monde, de nous organiser ensemble, et de coexister avec le reste du vivant.

Ce n’est pas un appel naïf à la suppression de toute structure ou de tout leadership, mais à une transformation de la manière dont le pouvoir circule : un pouvoir partagé, négocié, toujours réversible — et non accaparé.


C’est aussi là que se joue l’enjeu de la Nonviolence Systémique. Cette approche ne se limite pas à l’absence de violence physique : elle vise à conscientiser les structures qui perpétuent la domination — qu’elle soit sociale, économique, culturelle ou écologique.


Car une société véritablement non violente n’est pas celle qui nie les conflits ou les désaccords, mais celle qui apprend à les traverser sans recours à l’écrasement, à la hiérarchie rigide ou à la mise à l’écart de l’autre.


C’est dans cette lucidité que se trouve peut-être la clé d’un futur plus équilibré : non pas en refusant toute forme d’ordre, mais en désapprenant la domination comme norme, pour laisser place à des formes d’organisation vivantes, conscientes et profondément humaines.


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